Si souvent perçue comme une finalité sur les tatamis, la ceinture noire ne serait-elle pas pour autant vécue comme une responsabilité trop lourde à porter ?
J’ai maintes fois entendu au travers de conversations qu’obtenir la très convoitée ceinture noire pouvait être ressenti comme un poids.
Dans l’inconscient collectif, la couleur de cette ceinture représente bien plus que des heures d’entrainements, une sorte de super pouvoir d’invincibilité.
Nourri par ce mythe, une multitude de débutants poussent la porte d’un dojo pour l’acquérir, c’est en quelque sorte pour eux le Graal à décrocher.
La plupart renonceront dès que les premières difficultés feront face, d’autres auront la mauvaise fortune de croiser la route d’un " senseï mystificateur " qui, décernant les grades tel un prêtre donnant l’hostie un jour de messe, se jouera de ses élèves avec un consentement digne du syndrome de Stockholm.
Les adeptes de ce genre de " senseï ", sur qui il ne faut pas jeter l’opprobre, auront beaucoup de mal à exister en dehors de leur zone de confort. Ils seront constamment tiraillés entre le fait de faire respecter leur grade, sans en avoir la possibilité technique, et la conscience de leur niveau. Ce schéma qu’ils reproduiront sans cesse les poussera dans une double contrainte qui annihilera toutes formes d’évolutions. Lors de différents stages, j’ai eu l’occasion de croiser quelques " black belts " et autres hauts gradés de ce style qui erraient sur les tapis.
Pour les moins scrupuleux et les plus attachés à leur charismatique enseignant, ils retransmettront incessamment le mal acquis comme une chaine de télé retransmettrait un mauvais tube d’été.
Pour ces derniers, la complaisance et le manque de sincérité seront malheureusement leurs meilleurs " ukés ".
Avant de recevoir ce grade j’étais convaincu du fardeau que pouvait engendrer celui-ci mais la perspective d’avoir cette couleur autour de ma taille se caractérisait par une saine pression.
Au Himei dojo, la mystique est balayée par la technique et tout ce qui l’entoure, abnégation, patience, humilité... C'est ce qui permet de se sentir à l’aise dans son niveau.
Ma soif d’apprendre et l’enseignement que je reçois dépassent la pseudo reconnaissance acquise par l’illusion d’un " senseï "dont les techniques sont limitées aux portes de son espace d’expression.
J’ai la chance d’avoir un Senseï qui m’a permis d’effectuer mon quatrième voyage au Japon et de pratiquer au Hombu dojo.
Sur place et sous le regard aiguisé du fondateur, Soke Irie Yasuhiro, on prend rapidement conscience de l’importance d’être formé sérieusement.
Une bonne formation aux rudiments de son art martial permet d’être soulagé de ce pesant précieux trop important, selon mon goût, aux yeux de certains. Pour ma part, je n’y ai apporté ni plus ni moins d’importance qu’un pas de plus sur le chemin de ma passion qu’est le KoKoDo JuJutsu.
Pour conclure, je mentirai en disant que je n’ai pas eu d’appréhension en la portant la toute première fois sur les tatamis mais quel bonheur de ressentir cette ceinture comme la reconnaissance de nombreuses heures de labeur et de joies intenses !
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